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"Le chevalier – Le chevalier-mage – Tome I" de Gene Wolfe

Serait-il possible d’être parfaitement objectif en parlant d’un livre de Gene Wolfe ? Pas pour moi, surtout quand il est très bien servi par son traducteur, J-P. Durastanti.

Voilà un livre comme en en voudrait tous les jours, plein d’imagination, de rêves, d’aventures, juste à la limite entre deux mondes… Où son jeune héros s’est-il vraiment perdu ? Nous saurons qu’il vivait en Amérique et qu’en attendant son frère qui devait revenir le chercher le lendemain, il comptait aller à la pêche… Il a préféré partir se balader, découvrir une belle orépine où tailler une branche puis rêver devant les nuages. Seulement voilà, le temps passait vite et dans le noir, son chemin était si peu évident qu’il s’est engagé en Ælfrie. À ce qu’il semble car, en fait, s’il se souvient bien d’avoir été attrapé, c’est dans une grotte qu’il se retrouve auprès d’une étrange vieille femme en train de filer. Que file-t-elle exactement ? Mais comme ses réponses sont plus énigmatiques que les questions posées, autant en sortir et chercher son chemin après qu’elle lui ait donné un nom, Able, qui n’est pas le sien, et un morceau de fil en guise de corde d’arc.
Après avoir passé la nuit chez de pêcheurs qui l’ont aperçu sur la plage et l’ont ramené chez eux, il entend bien rentrer chez lui même si les indications obtenues ne sont guère probantes. Il va croiser en route Berthold le Brave, un vieil homme diminué qui croit le reconnaître pour son frère, et s’arrêter quelque temps auprès de lui puis un chevalier, qu’il guidera, avant de finir par rencontrer Disiri qui lui donnera tout à la fois un corps d’adulte et une quête car, si amoureux qu’il en devienne, il ne la reverra qu’après avoir trouvé « l’épée ».
Rien que de relativement classique donc, mais quand Wolfe écrit du classique, cela n’en est plus vraiment. Il y a cette manière d’écrire qui fait qu’en dépit de décors bien délimités : ce monde-ci en ce temps-ci, celui d’un tout jeune adolescent américain et, passé le sas d’une grotte qui les isole, ce monde-là, peuplé de chevaliers, d’aelfes, de dragons et de magie, rien n’est vraiment délimité… Le glissement réel ne se fait justement pas au niveau des mondes mais comme à côté… où exactement ? Ce n’est pas vraiment inattendu, déjà, dans Soldat des brumes, l’auteur exprimait ce talent particulier pour rester précisément sur cette limite floue pendant qu’il vous perdait dans le brouillard avant, juste un instant, de vous laisser buter sur la réalité.
Faut-il le préciser ? Lire Wolfe est un enchantement. À moins que celui-là ne soit tout simplement un enchanteur. Les éditions Calmann-Lévy n’ont donc pas pris un bien grand risque en en faisant l’un des trois titres phares de sa nouvelle collection consacrée à la fantasy mais, l’on ne peut que se réjouir de la sûreté de leur choix pour les amateurs de littérature en général et de fantasy en particulier.

— Hélène

Éditions Calmann-Lévy – 429 Pages – 22,50 €
ISBN 2-7021-3620-6

Cibylline

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