« Abraham Lincoln, chasseur de vampires » de Seth Grahame-Smith
Voilà une « biographie » d’Abraham Lincoln qui change agréablement de ces vies fastidieuses des grands hommes dispensées dans toutes les « bonnes » librairies. Naturellement, je ne prendrai pas de paris sur sa véracité historique ! Mais, si vous voulez tenter votre propre chance, je vous en garantis la saine crédibilité. C’est dire combien j’ai pris d’intérêt à ce récit alors même que les histoires de vampires m’ennuient profondément.
Nous ne saurons du narrateur, simplement, qu’il est écrivain et tient un bazar sur East Market Street dans le bourg de Rhinebeck, pas très loin de Manhattan, sans arriver à joindre les deux bouts. Qu’il est marié et père aussi, information négligeable. Mais la chance aura voulu qu’un client sympathique lui prête une dizaine de carnets reliés de cuir en lui proposant d’en tirer un manuscrit.
Et ces précieux carnets ne contiennent rien de moins que le journal intime d’Abraham Lincoln.
C’est ce journal donc qui est ici retranscrit scrupuleusement depuis l’époque où le jeune Abe, à sept ans, parti chasser le dindon muni des seules recommandations de son père, fut terrifié par la vue du sang au point que toute vie lui devient sacrée. Puis nous suivrons son enfance, les décès tragiques du plus petit frère, de la sœur puis de la mère, que l’enfant ne pardonnera jamais à son père.
Puis, peu à peu, sa découverte des vampires, de leur rôle dans l’esclavage… N’y avait-il pas là un réservoir inépuisable de sang frais dont aucun propriétaire sudiste n’avait grand souci ? De là à ce qu’il faille être à peine poussé pour devenir chasseur de vampires, il n’y avait qu’un tout petit pas qu’un certain Henry, vampire lui-même mais doté d’un certain sens moral doublé d’un désir de vengeance, l’aida à franchir. Et voilà déjà pour le sacré de toute vie !
Le récit détaillé est donc entrecoupé d’extraits du journal de Lincoln, d’illustrations et de gravures « d’époque », bref, tout ce qu’il y a de plus crédible. Il y a, dans cette façon d’écrire, une certaine connivence qui s’établit entre l’auteur et le lecteur et crée un amusement partagé alors même qu’il s’agit, en soi, de bâtir un tas d’histoires horribles pour éclairer un personnage tellement connu que le mythe ne saurait en souffrir. Il n’est pas certain que l’adaptation cinématographique en cours, en collaboration avec Tim Burton, saura en préserver l’humour particulier.
À recommander sans doute aux amateurs de vampires mais, également, à tous les amateurs de curiosités.
Éditions Eclipse
393 pages – 18 €
ISBN : 9-782362-700286