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"La Dame des MacEnnen" d’Armand Cabasson

C’était une chouette idée que de penser au devenir de ces anges qui ne s’étaient pas associés à la révolte des leurs, sans pour autant soutenir le Trône de Dieu. Et l’idée qu’ils pussent être tombés sur terre sans réel espoir de rédemption aussi. L’auteur nous narre ce que devint Enneline, archange déchu dont les ailes furent brisées et qui finit au fond d’un lac l’Écosse. Un jour les hommes, ces créatures gauches et presque contrefaites, parurent sur les rives du lac. Et puis, après les avoir chassés en créant des monstres ou en soulevant des tempêtes, le cœur de celle qu’on commençait à appeler la Dame du Lac s’adoucit. Elle accepta de recevoir des présents en offrande, puis de protéger la première tribu qui l’avait vénérée. Et cette protection, qui avait été une simple coutume, finit par devenir pour Enneline un devoir et un privilège jusqu’à ce qu’elle finisse par être regardée comme protectrice tutélaire du clan qui l’avait adoptée sous le nom de Dame des MacEnnen. Ainsi, de génération en génération, et malgré l’emprise croissante de la nouvelle religion, le chef du clan lui voua-t-il un culte secret et païen.

Mais l’Histoire se charge de modifier les histoires et, à force de côtoyer les hommes, même les anges finissent par les aimer. Ainsi, en devenant la maîtresse du splendide et vaillant Ingram MacEnnen dont elle savait qu’il périrait au cours des guerres entre York et Lancastre, la dame des MacEnnen découvrit-elle le chagrin. Et toute sa révolte ne put l’empêcher de devoir tisser le chant annonçant son trépas aux siens.
Ainsi pourrait s’achever la légende. Mais le parcours d’Enneline la ramènera vers ses semblables.
Tel quel, le roman se noue entre des fils parallèles, l’histoire de l’ange se juxtaposant à celle de l’Écosse jusqu’à la Guerre des Roses, avec de longues descriptions précises de batailles qui s’y sont déroulées dont Bannockburn n’est pas la moindre. C’est malheureusement là la faiblesse du roman. Car la légende s’accorde mal à ces échappées érudites et précises puisque l’on peut apprécier l’une et les autres mais il y faut une extraordinaire maîtrise des « raccords ».
L’écriture de l’historien, si intéressante soit-elle, s’accommode mal d’une histoire qui mériterait une certaine fluidité poétique. Enfin, les motivations ici prêtées à Dieu frisent à ce point le ridicule à notre époque que, malgré toute la « suspension d’incrédulité » consentie par le lecteur, cela « ne passe pas ».
La fantasy et l’histoire font parfois bon ménage, surtout quand l’idée est originale et l’auteur érudit, mais on y prend le risque de gâcher l’une ou l’autre et, parfois, les deux. C’est grand dommage.

— Hélène

Éditions Glyphe – Imaginaires
141 pages – 14 €
ISBN 978-2-35285-048-9

Cibylline

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