« Les Îles glorieuses II – Guérisseur » de Glenda Larke
Si ce deuxième tome traite bien de la poursuite des aventures de Braise Sangmêlé, héroïne de Clairvoyante, qui les raconte en partie, il fait la part belle à un nouveau personnage, Kelwyn Gilfeather. C’est en effet par un hasard malheureux que celui-ci s’est retrouvé mêlé à l’histoire.
Rien ne laissait supposer, en effet, qu’un guérisseur descendu des Prairies célestes à Port-Mékaté sur une convocation concernant Jastriàkyn, son ex-épouse, pourrait croiser le chemin de Braise et de Lyssel Coursevent.
Mais les trois femmes étaient alors en prison et le sort de l’une ne pouvait que le lier au sort des autres. Ainsi, en assurant à sa demande une mort rapide à Jastriàkyn pour lui éviter l’horreur de la lapidation, Kelwyn, lui, n’évitera pas la souffrance. Et il ne pourra même pas se réfugier auprès des siens qui refusent toute forme de violence et, plus encore, de la part d’un guérisseur.
C’est à travers son propre récit, dont les parties manquantes seront comblées par Braise, que nous suivrons d’abord leur fuite et, ensuite leur recherche acharnée du Maître-carme Mordeth qui a réussi à échapper du massacre de la Pointe-de-Gorth et sème une piste destructrice de magie carmine derrière lui. Cette course est d’autant plus pressante que le caractère de Lyssel devient sujet à de douloureuses sautes d’humeurs alors même que ses blessures dues à la magie carmine ont été réellement et totalement guéries.
Il y a, dans ce roman, et c’est ce qui en rend la lecture si agréable, une particulière « authenticité ». Vous me direz que nous ne vivons pas dans un monde où s’exerce la magie, et moins encore deux magies. Mais si, certainement. Il suffit de lire les délicieuses lettres qu’envoie Shor Iso Fabold à son ethnologue d’oncle pour en être persuadé. Ces Kellois qui attachent tant d’attention aux récits des vieux habitants des Îles Glorieuses, cherchant à discerner la réalité du mythe, ne nous sont-ils pas tout proches ? Moins de deux siècles, sûrement. Comment ne pas les reconnaître, passionnés de recherches et d’inventions, pétris de supériorité masculine – les femmes sont si fragiles – et si imbus d’eux-mêmes. Ne suffit-il pas de regarder de vielles photos, de lire Jules Verne, ou n’importe quel auteur de l’époque, pour les retrouver tels quels ?
Il y faut beaucoup de talent, mais Glenda Larke n’en manque pas. C’est dire que j’attends vivement la suite. C’est dire aussi que la fantasy peut parfois s’affranchir à ce point de ses frontières que l’étiquette n’a plus vraiment de signification.
Éditions J’Ai lu
478 pages – 7,60 €
ISBN : 978-2-290-02726-4