« Le Dieu était dans la lune » d’Hervé Thiellement
Bien embêtant de se retrouver en panne dans l’espace, mais rien de grave puisqu’on peut y croiser des anibulles. Et c’est ce qui arrive au jeune capitaine Gontran Rieu, contraint de gagner plus ou moins honnêtement sa vie comme caboteur entre lunes et astéroïdes après que son père en ait eu assez de payer les études d’un jeune homme aussi indiscipliné.
S’est-il assagi ? Non point. Puisque la chance a placé une anibulle sur sa route, voici une belle occasion de s’associer à cette créature intelligente, capable de voyager plus vite que la lumière tout en emportant n’importe quel astronef dans ses replis tel un immense marsupial.
Leur première affaire commune devrait être de tirer des informations d’un répugnant obèse, Brutus, patron d’un bar louche à Down Mongo. Mais c’est prendre un bien grand risque pour de petits escrocs que d’affronter la vraie pègre. Pourtant le deus ex machina, qui n’est pas celui de la lune, viendra à la rescousse sous les traits d’un autre humano, Lursu. Un troisième associé, donc.
Et puisqu’il est de tradition de trouver une fille dans chaque port, ils en ramèneront deux (dont une métamorphe) de leur arrêt suivant sur Himalaya cinq, pour compléter leur équipe.
Pendant ce temps, sur la planète Florissante, le vieux professeur Heinz Friedrich Liechtenstein Kronstadt faisait ses adieux à son université, estimant le temps venu de poursuivre tranquillement ses travaux sur le temps et la lumière à bord de son astronef trans-continuum, en compagnie de sa fille Irina.
Or, par un de ces hasards extraordinaires qui sont l’apanage d’un destin facétieux, les voyageurs vont se croiser.
Destin facétieux ou dieu malveillant ? Car, dans un espace fort lointain, une chose a émergé de la soupe originelle sur un astéroïde perdu qu’elle a colonisé. Une chose indifférenciée mais qui a pris vie. Et avec la vie, la pensée. Et avec la pensée, la connaissance. Et avec la connaissance, le désir de pouvoir sur les êtres… Qui dira jamais les méfaits auxquels peuvent atteindre les religions ? Mais l’auteur est optimiste, hein, car la connaissance ne serait rien sans la réflexion, même si elle n’est pas aussi spontanée qu’on la voudrait. J’aurais même tendance à dire ici toute l’utilité des coups de pieds dans le fondement.
On l’aura compris, il s’agit là d’un space opera qu’on ne saurait mieux qualifier que le fait l’auteur : « SF de papa ». Une joyeuseté anti-cléricale mais pas bien méchante sous les auspices des copains, de l’apéro et des « bonnes femmes ». Voilà de quoi rappeler furieusement (aux plus anciens) toute une époque, notamment les films d’Eddie Constantine et sa chanson Cigarettes et whisky et p’tites pépées, sans parler de l’humour particulier de Tex Avery et autres clins d’œil glissés au cours des pages.
Aucune prétention ici. Un tout petit livre, juste pour rire, et qui y réussit très bien.
Éditions Rivière blanche
188 pages – 17 €
ISBN : 978-1-61227-065-4