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Coprophanaeus N°2 – "La Forêt"

Prom’nons-nous dans l’Copro
Tant qu’le loup n’y est pas…

On ne refuse pas une petite promenade dans les bois quand c’est le Copro qui invite. Bien sûr, il est facile de s’attendre à certaines rencontres : grands arbres aux ramures majestueuses, arbustes tordus en quête de hauteur, troncs ébranchés… Il s’agit bien d’une forêt, avec tout ce qu’elle peut receler de plus agréable, de plus prometteur, ou moins. On appréciera certaines clairières de style, on évitera les fourrés broussailleux où se perdre. La mise en page est claire, sans fioritures. Illustrations doucement rêveuses alternent avec dessins plus descriptifs ou photos bien choisies, sans que cela ne vienne alourdir la lecture. Comme dans chaque sous-bois, toutes les frondaisons n’atteignent pas la même altitude, mais l’ensemble mérite la balade.

Les bois… Adrakelen De Mortelune
On peut craindre au début la énième diatribe sur l’homme corrupteur de la nature, mais se laisser bercer ensuite par la poésie de l’évocation. Quelques images hasardeuses ne doivent pas gâcher le plaisir : on se sent bien en ces bois. Une bonne ouverture, donc.

Mes douces nymphes Nicolas Bally
Brève incursion dans la forêt mythologique. Trop courte, malgré des notes intéressantes (cette forêt où tant veulent entrer) pour que je m’y sois arrêté longuement. L’indéniable facilité de plume dont fait preuve l’auteur aurait mérité plus de ramures sur ce tronc un peu sec. Peut-être n’ai-je pas tout saisi.

Hamadryade Léo La Treille
Comment la vraie Foi peut-elle prendre racine sans détruire les croyances anciennes ? La réponse proposée est desservie par une écriture banale, des fautes et des images incongrues (ces clous centenaires encore brillants), comme si un scénario pour Kubrik avait été confié à Max Pécas. Malgré une belle frénésie au dernier tiers, le style poussif tend à essouffler le lecteur. Peut-être devrais-je m’entraîner plus…

Les primevères se souviennent Thomas Dumoulin
Belle parabole sur la permanence du savoir et la nécessité de sa transmission. L’écriture fluide laisse passer une certaine érudition nordique mais ne s’embarrasse pas de tension dramatique. Juste une promenade, à suivre d’un œil alangui.

L’âme de la forêt François Schnebelen
Peut-on trouver l’idéal féminin au cœur d’une forêt et rester totalement sain d’esprit ? A la lecture de cette histoire, la question ne passionne pas. L’écriture correcte mais laborieuse et l’application à développer des images banales génèrent vite un début d’ennui. Que l’absence de réel enjeu installe jusqu’au bout.

Clothilde court dans la forêt Karim Berrouka
Une course à la vengeance, avec l’aide de la forêt, par un bloc de douleur qui fut peut-être brièvement une femme aimante puis doublement trahie. Originalité du mode d’écriture, puissance des évocations, détail du châtiment : tout concourt à tailler un bijou brut d’un éclat sombre. Cette scansion âpre et rude pourrait lasser à moyenne échéance, mais trouve son format dans la brièveté. Les apports d’une position morale ne sont pas étrangers au plaisir de cette lecture sans concession. On peut trouver cela difficile : on aura tout intérêt à persister.

La Forêt bleue Livia Galeazzi
Où donc va se cacher l’âme des enfants, quand les parents veulent qu’ils grandissent trop vite ? Cupidité, mépris des cycles naturels, appel à des forces mal maîtrisées : ce conte brasse avec légèreté et talent les grands thèmes de notre misère écologique actuelle. Une jolie leçon qui se lit comme une histoire et passe en douceur.

La gélule du futur Xavier Froment
Peut-on encore écrire une histoire sur les multiples moyens offerts à l’homme pour détruire (ou reconstruire) son environnement ? Apparemment, oui. Est-ce encore nécessaire ? Si c’est original et talentueux, oui aussi. Je vous laisse juge.

Concert de bois M. Sophie Charpentier
Est-il possible de se perdre avec plaisir dans une forêt musicale lorsqu’on n’a que sept ans ? Certes, mais le lecteur passe lui plus de temps dans un embouteillage de grandes personnes que dans le concert de bois promis par le titre. Dommage. Vous savez que je n’aime pas dire du mal, mais effectivement c’est gentil…

Que sa volonté soit verte Menolly
Qui pourrait résister à la pression d’une forêt vengeresse ? Et si la question – ou la réponse – n’était pas là ? Voici une nouvelle vision d’un avenir pour l’humanité troussée comme un combat. Faut-il tout faire pour gagner, ou envisager de perdre avec sérénité ? La réponse dépasse le débat habituel. Le jeu de mot du titre promettait cependant plus d’humour. Une autre fois ?

Celle qui s’enracine et croît dans le cœur Héloïse Jacob
Faut-il s’inventer une forêt royaume sur laquelle régner ? Ou garder cette possibilité en son cœur, pour peupler les jours insipides… La question et la réponse ainsi posées ne manquent pas de charme, de style ou de fluidité. Peut-être cette forêt aurait-elle mérité un peu plus d’ampleur, pour dépasser le stade du bosquet gentil et réduire l’impression d’être abandonné en lisière d’un monde à explorer.

Alors que se referment ces bois dont on fait les belles feuilles, que dire de plus, sinon que peu d’auteurs se sont aventurés dans l’humour (à part une note de noirceur chez Menolly). Moi qui aime bien rigoler, même au risque de me prendre les pieds dans une racine et m’étaler dans les ronces, je reste un peu sur ma faim dans cette forêt des plus sérieuses. Le thème, peut-être, n’invitait-il pas à la gondolade. Ou alors, Zaahne et Meor n’était pas d’humeur lors de leur choix de textes. Tant pis, chatouillons-nous un peu en attendant le sapin…

— Don Lorenjy

Coprophanaeus
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Cibylline

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